|
Jour 275 |
Quand je finis une photo je suis
à bout de souffle. J'arrête de respirer. Tout est concentré dans l'index, les
deux pieds fixés au sol. Il y a de l'urgence là-dedans. Celle de bien faire,
celle de déclencher vite parce que je sais que le moment est éphémère. Et puis,
si je ne me dépêche pas, soit je rate cette photo soit je fais une syncope.
|
Jour 276 |
La
photo c'est une autre respiration. Elle n'a pas besoin d'air, elle marche aux
sentiments, elle marche aux coups de vie. Elle est mon outil autant que je suis
sa servante. Elle m'en fait baver tous les jours et me rappelle vite qui je
suis. Mieux qu'un psy elle sait me montrer mes failles et me faire passer le
cap.
|
Jour 277 |
Cette urgence à fixer des moments
comme pour capturer les souvenirs le jour où je n'en aurai plus. La mémoire, ça fout le camp dans la famille, alors il faut y mettre les mots et les images
.... pour plus tard. Mon grand-père est mort sénile (on était seulement à
quelques mois d'appeler ça Alzheimer). Mon père vieillit et un jour je serai la
seule à me souvenir de ce qu'il m'a raconté de sa jeunesse, de sa vie en
Algérie, de son mariage bancale et de tout le reste.
|
Jour 278 |
Mes images sont ma mémoire, ma
transmission. A qui ? Aucune idée, chacun prendra ce qu'il veut.
|
Jour 279 |
|
Jour 280 |
C'est sans doute pour ça qu'il y
au autant de portraits dans mes images. Quand je serai vieille je passerai peut
être mon temps à me dire : "mais qui ça peut bien être ??!!" Je fouille
les visages à la recherche de sentiments, d'émotions comme d'autres cherchent
l'origine du big-bang. Ca m'intrigue ces gens qui sourient avec la bouche bien
plus qu'avec les yeux. Ce qu'il se passe dans leur tête au moment où je
déclenche .... D'autres se demanderaient si je ne cherche pas leur âme finalement
... qui sait. Comme je l'ai déjà écrit, je suis athée, alors pour l'âme .... Je
veux juste être là au bon moment, sans être vue finalement.
|
Jour 281 |
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire